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Ausgabe:

Juli/August/2016

Spalte:

770–771

Kategorie:

Neues Testament

Autor/Hrsg.:

Chapman, David W., and Eckhard J. Schnabel

Titel/Untertitel:

The Trial and Crucifixion of Jesus. Texts and Commentary.

Verlag:

Tübingen: Mohr Siebeck 2015. XXIV, 867 S. = Wissenschaftliche Untersuchungen zum Neuen Testament, 344. Kart. EUR 89,00. Lw. EUR 189,00. ISBN 978-3-16-153786-8.

Rezensent:

Armand Puig i Tàrrech

Les matériaux recueillis dans ce gros volume contribuent à situer le contexte historique, au sens large, des deux procès et de la condamnation à la peine capitale de la crucifixion auxquels Jésus de Nazareth a été soumis. Malgré le titre, il ne s’agit pas d’une étude sur les textes évangéliques, ou même néotestamentaires, qui traitent de la passion et de la mort de Jésus. L’étude vise les sources non-bibliques – la seule exception étant Dt 21,22–23 et Esther grec 7,9 (B) (cf. respectivement 3.5.1 et 3.9.3). Le but de l’ouvrage est donc, comme l’affirment ses auteurs dans la préface, la publication des textes fondamentaux (»primary texts«), déjà cités dans la recherche exégétique précedente et plutôt récente, et qui se rapportent à trois grands sujets: le procès juif, le procès romain et la crucifixion de Jésus. Le choix des 462 (!) textes présentés par les A. a été fait selon un critère plutôt accumulatif avec un résultat imposant et fouillé. Chaque texte est donné dans sa langue originale et est suivi d’une traduc-tion propre des A. et d’un commentaire.
L’ouvrage se divise en trois parties: »The Jewish Trial before the Sanhedrin« (1–151), »The Roman Trial before Pontius Pilate« (152–298) et »Crucifixion« (299–754). Les deux premières parties ont été rédigées par E. J. Schnabel et la dernière par D. W. Chapman. Une large bibliographie (755–804) et des index de sources anciennes (805–845), d’auteurs modernes (847–859) et de thèmes (861–867) concluent le livre. Chaque partie s’articule autour des sujets (acteurs et événements) qui constituent le récit évangélique de la passion. Ainsi se trouvent les grands prêtres, le ius gladii juif, les témoins, les accusations contre Jésus (surtout les blasphèmes) dans la première partie, la figure de Pilate, sa juridiction, la charge contre Jésus (le crimen maiestatis et la seditio), les éléments du procès et de l’exécution de la sentence dans la deuxième partie. Par contre, la troisième partie analyse la longue évolution de la peine de la crucifixion, qui va depuis les cultures anciennes du Moyen-Orient jusqu’au monde hellénistique et gréco-romain – c’est pour cela qu’il conviendrait d’inverser l’ordre de 3.3 et 3.4 – sans oublier le monde juif, où la peine de la crucifixion déclenchait un refus, parfois à côté d’une acceptation factuelle.
Un des mérites de cet ouvrage est le rassemblement de matériaux, réalisé en bonne partie à partir des études actuelles. Le lecteur a face à lui une sorte de panorama sur les textes qui pourraient être inclus dans un éventuel dossier sur le procès et l’exécution de Jésus. En ce qui concerne la crucifixion, l’ouvrage s’inspire des monographies de M. Hengel (1976, allemand et anglais; 1981, français), L. Díez Merino (1976), H.-W. Kuhn (1982), de D. W. Chapman lui-même (2010), G. Samuelsson (2013) et du splendide travail de J. G. Cook (2014) – ce dernier étant trop récent pour être suffisamment repris par les A. En ce qui concerne le procès de Jésus, les monographies qui apportent le plus de données sont celles de J. Blinzler (1951, 41969), A. Strobel (1980), R. E. Brown (1994) et H. K. Bond (2004) et les contributions de C. A. Evans et D. R. Schwartz. En plus, le livre tient compte d’une pléiade de monographies plus spécialisées et de commentaires des récits de la passion de Jésus. Il est indéniable que le rassemblement de matériaux, enrichi par des textes que les A. puisent dans les sources anciennes, est utile pour la compréhen-sion du procès de Jésus.
Néanmoins, l’effort aurait abouti à un résultat plus satisfaisant pour l’exégèse néotestamentaire si l’ouvrage avait discuté plus largement des éventuels rapports existants entre les données du contexte greco-romain et juif et les récits évangéliques de la pas-sion. L’ouvrage de Chapman-Schnabel accorde une place trop re-streinte à ce que le titre indique: »le procès et la crucifixion de Jésus« (c’est moi qui souligne). Il est vrai que l’on trouve parfois des points de repère dans ce sens comme, par exemple, dans les brèves sections intitulées »le procés romain de Jésus et la loi romaine« (241–243), »résumé de l’évidence (sur la crucifixion dans le monde juif) et la question de la crucifixion de Jésus« (528–532), et »les événements antérieurs à la croix« (671–674). Mais le lecteur aurait apprecié un schéma systématique de résumés ou de conclusions répandus tout au long de l’ouvrage qui reccueillent les résultats de chaque section, procèdent à leur évaluation critique et explicitent leurs apports aux événements racontés dans les évangiles. Sans entrer dans une exégèse proprement dite des textes évangéliques, on les aurait éclairci à partir de l’évidence provenant des textes présentés préalablement. Et, en plus, des prises de position trop rapides par rapport aux événements de la passion de Jésus auraient été évitées.
Un premier exemple de ce dernier propos est l’affirmation de la possible existence de procès-verbaux écrits de la procedure intentée par Pilate contre Jésus, une possibilité qui ne s’accorde pas avec le caractère de procès extra ordinem que celui-ci a subi – comme d’ailleurs les A. eux-mêmes le reconnaissent (249). Un deuxième exemple concerne l’épisode du relâchement d’un prisonnier à l’occasion de la Pâque juive (268 f.). Tout d’abord, on affirme que les cinq textes proposés (nn. 102–106, trois romains et deux juifs), déjà connus par d’autres auteurs, montrent qu’il est possible qu’il y ait une pratique romaine de venia, ponctuelle et locale, laquelle pourrait être appliquée par Pilate à Jésus. Les textes ne vont pas au-delà. En tout cas Suetonius (Tibère 47), qui mentionne le relâchement d’un esclave qui avait lutté avec succès dans l’amphithéâtre grâce à la pression du peuple auprès de l’empereur, aurait pu être sans doute cité. Et il aurait fallu enlever du dossier le n. 104 (Antiquitates 20,215) (le gouverneur Albinus épargne la vie de personnes non condamnées à la peine capitale en leur exigeant de l’argent et sans aucune intervention du peuple, dans un contexte qui n’est pas celui de la Pâque). De l’autre côté, le n. 105 (Epistula 10,31–32 de Pline) (il est affirmé seulement qu’un gouverneur provincial a libéré des condamnés, mais il ne s’agit pas de condamnés à la peine capitale) et le n. 106 (m. Pesahim 8,6) (la phrase »celui auquel on a promis la liberté à l’occasion de Pâque« n’indique pas nécessairement un relâchement, même si on ne l’exclut pas) sont douteux. Restent le papyrus de Florence I,61 (même si ici la peine est celle de la flagellation et non la peine capitale) et Titus Livius (De urbe condita) (même si cet auteur raconte une condamnation à la peine capitale qui a eu lieu en 325 av. J. C. à Rome). En définitive, l’épisode de Pilate, Jésus et Barrabas est tellement singulier que les cinq sources néotestamentaires qui le méntionnent (Mt 27,15–26; Mc 15,6–15; Lc 23,13–25; Jn 19,16–39; Actes 3,14) constituent en fait le témoignage fondamental (le »primary text«) d’un élément qui détermine la peine capitale de Jésus, décrétée par Pilate.
Bref, cet ouvrage constitue une aide bienvenue et utile à l’étude des récits de la passion de Jésus. L’exégèse du Nouveau Testament saura en tirer profit. Les A. fournissent un »con-texte« à ces récits et par là contribuent à une meilleure interprétation des »textes«. Ceci est la tâche qui reste à mener à terme.