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Ausgabe:

Juni/2015

Spalte:

648-651

Kategorie:

Neues Testament

Autor/Hrsg.:

Schröter, Jens [Transl. by W. Coppins and S. B. Pounds]

Titel/Untertitel:

Jesus of Nazareth. Jew from Galilee, Savior of the World.

Verlag:

Waco: Baylor University Press 2014. XX, 309 S. m. 20 Abb. Geb. US$ 49,95. ISBN 978-1-48130-199-2.

Rezensent:

Armand Puig i Tàrrech

Neben dem angegebenen Titel in dieser Rezension besprochen:

Schröter, Jens: Jesus von Nazaret. Jude aus Galiläa – Retter der Welt. 2., durchges. Aufl. Leipzig: Evangelische Verlagsanstalt 2009. 383 S. m. Abb. u. Ktn. = Biblische Gestalten 15. Kart. EUR 18,80. ISBN 978-3-374-02409-4.


Le livre de Jens Schröter sur Jésus de Nazareth a été publié pour la première fois en allemand, en 2006 et il a connu une deuxième édition en 2009, presque identique à la première (correction de quelques fautes d’impression et actualisation de la bibliographie). La quatrième édition allemande (2012) a été utilisée pour la traduction anglaise, que Baylor a publiée récemment (2014), bien que, entre temps, apparaissait déjà la cinquième édition allemande (2013), identique à la quatrième. Différemment de l’édition allemande, l’américaine se présente avec un index de cites bibliques et de sources anciennes (291–302) et un deuxième index d’auteurs modernes (303–305). Par contre, on trouve dans les deux éditions un appen-dice avec des cartes de géographie et des œuvres artistiques, qui illustrent le thème de la souffrance du Christ, traitée dans le chapitre 14, le dernier, qui est dédié à la Wirkungsgeschichte de Jésus.
Les raisons du succès de l’ouvrage de S. se trouvent, tout d’abord, dans le style accessible et clair et les capacités didactiques de S. qui veut faire »eine Skizze« de la figure de Jésus (préface à la première édition allemande) (10) sans pousser jusqu’au fond le débat exégé-tique mais sans éviter non plus les questions posées par la re-cherche actuelle – souvent mentionnées dans les notes sélectives de l’ouvrage (259–277 de l’édition américaine). Il s’agit donc d’un exégète expérimenté qui écrit pour un grand public mais limité aux membres de l’Église qui s’intéressent à la figure de Jésus: milieux académiques, participants aux colloques pastoraux, communautés chrétiennes (début de la préface de la seconde édition). D’autre part, S. est convaincu de la continuité entre le Jésus de l’histoire et le Christ de la foi, c’est-à-dire, de la nécessité de s’approcher de Jésus sans couper le rapport entre histoire et théologie, entre critique historique et confession de foi. Ce point est décisif, soit en ce qui concerne le dépassement du défi posé par les Lumières, soit en ce qui concerne la réception de l’exégèse historique et critique dans les confessions chrétiennes d’aujourd’hui. Ce n’est pas par hasard que les ouvrages de Dunn et Theißen restent les deux points de référ­ence de S. Malheureusement, comme c’est fréquent, les contribu-tions de l’exégèse latine au Jésus historique restent plutôt dans la pénombre. L’ouvrage de B. F. Meier (The Aims of Jesus, 1979), essentiel au déclenchement de la Troisième Quête sur Jésus, n’est pas non plus cité.
Dans un livre sur Jésus, un des thèmes majeurs est la disposi-tion des matériaux, l’index général. Dans l’édition allemande le livre est divisé en trois parties: A) Introduction (Einführung) (14–70), en quatre chapitres, B) Description (Darstellung) (71–323), en cinq chapitres, C) Effet (Wirkung) (324–364). Dans l’édition américaine le livre est divisé en deux grandes parties et quatorze chapitres: »Introduction« (1–40) (chapitres 1–3) et »Portrayal of Jesus« (41–247) (chapitres 4–14), précédées de quelques préfaces (IX–XX). Nous suivons ici l’édition américaine. Tout d’abord, le lecteur est introduit à la compréhension de Jésus à travers trois voies: le plaidoyer du chapitre 1 sur la nécessité de la recherche sur le Jésus historique, la seule qui assure une approche historiquement fondée sur les débuts de la foi chrétienne (»a historically grounded view«, préface de S. à l’édition américaine, XIV); une histoire brève des recherches sur Jésus à partir de Reimarus-Lessing, qui précise l’affirmation précédente en soulignant que la recherche historique ne peut fonder la foi chrétienne comme telle (»historical research can never ground the Chris­tian faith«) (17); le chapitre 3 s’attarde à présenter les sources non écrites (surtout celles qui ont été repérées dans les fouilles archéologiques) et écrites (chrétiennes et non chrétiennes).
La deuxième partie, qui constitue le corps de l’ouvrage, mérite une sorte de résumé préalable de S. (38–40) (»Zu diesem Buch«, 68–70 de l’édition allemande). S. y affirme que ce n’est pas possible d’écrire »a continuous biography of Jesus« à cause du manque d’informa-tion sur la vie de Jésus avant le début de son activité publique. Dit autrement, les récits de l’enfance seraient »legendary narratives« (38), sans aucune base historique, et même quelques détails de type biographique sur Jésus (p. ex., l’accusation de glouton et buveur, Mt 11,19 par. Lc 7,34) auraient seulement une relevance »program-matic«) (39). Cette opinio communis sur Mt 1–2 et Lc 1–2, où il n’y aurait rien de valable d’un point de vue historique (»nothing that is historically usable«) (47), risque d’être un locus communis qui est devenu vrai à force de le répéter (cfr. chapitre 4). A mon avis, il serait plutôt contradictoire de considérer les quatre évangiles canoniques comme prioritaires pour élaborer »a profile of the activity of Jesus in its historical context« (34) et d’autre part exclure radicalement le 6 % des matériaux synoptiques (Mt 1–2 et Lc 1–2). Il faut plutôt écarter tout parti pris et interpréter les données de type »historique« sur l’enfance de Jésus qui se trouvent dans ces quatre chapitres – ainsi que les données sur la famille de Jésus, repérables aussi chez Mc, Jn et Ac et dans les évangiles apocryphes. La recherche actuelle sur le Jésus historique, attentive au moindre papyrus, doit se poser la question sur la plausibilité des informations fournies dans les récits de l’enfance (cfr. un dernier essai dans cette ligne dans l’ouvrage collectif The Gospels: History and Christology: The Search of Joseph Ratzinger – Benedict XVI, Rome 2013, I, 351–507).
S. manifeste une grande assurance dans la possibilité de décrire le milieu où Jésus a vécu (le judaïsme galiléen du Ier. siècle), son activité (la prédication initiée après le baptême par Jean) et son destin final (la mort en croix). Dans l’esprit de ce qu’on appelle couramment »Troisième Quête«, S. insiste sur la judaïté de Jésus et la situe dans la région de Galilée, qui est décrite d’un point de vue so-cial, économique, politique et religieux (49–64) (chapitre 5). Néanmoins, il n’y a pas de description spécifique de Jérusalem ni des autres territoires que Jésus a visité d’après les quatre évangiles canoniques. Le chapitre 6 (65–83) place Jésus dans le judaïsme de son temps et les groupes qui le caractérisaient, avec une attention spéciale aux documents de Qumran, considérés comme une expres-sion des convictions plurielles du judaïsme de l’époque et qui ne dépendraient que des esséniens.
Les chapitres 7–10 (85–159) présentent le message de Jésus sur le Règne de Dieu qui commence à s’établir sur la terre, en paroles et en faits. S. y développe son savoir faire exégétique, et ses positions expriment généralement les résultats exégétiques les plus acceptés. On traite le conflit entre Dieu et Satan (miracles et exorcismes), la communauté des disciples, l’accueil des pécheurs, la rénovation d’Israël comme but de l’activité de Jésus – à mon avis, question fort discutable – et en même temps l’ouverture aux païens, la pensée apocalyptique (AssMos 10) aboutissant aux proclamations du salut et du jugement, l’ethos des disciples et de la famille de Jésus, la position de Jésus face à la Loi (sabbath, lois de pureté rituelle). D’autre part, S. remarque que Jésus se serait considéré comme l’envoyé de Dieu à son peuple, et ce serait lui même donné la dénomination de »Fils de l’homme«. Par contre, l’attente des gens qui le suivent se focaliserait sur la dénomination »Oint«/»Messie« (161–177) (chapitre 11).
Le destin final de Jésus est raconté dans le chapitre 12 (»The Jerusalem Events«) (179–199). S. ne se prononce pas clairement sur la durée du ministère de Jésus (un an?, trois ans?) ni sur la considération de la dernière cène comme cène pascale juive, et il n’essaye pas de confronter les récits des évangiles sur les dernières heures de la vie de Jésus. Il se borne à souligner que les événements de la Pas-sion sont »theologically interpreted history« (180). On traite successivement l’activité de Jésus à Jérusalem, les causes qui mènent à son exécution, la dernière cène et la question sur le caractère salvifique de la mort de Jésus – à laquelle on répond en montrant le sens que Jésus donne à sa vie comme une vie »vécue pour les autres« ( Pro-Exis­tenz). Jésus, comme le dit le sous-titre du livre, est vraiment »sauveur du monde«! Finalement, dans le chapitre 13 (201–217) S. reprend son idée germinale sur la continuité presque totale entre le Jésus pre et post-pascal. Au risque de diminuer la portée de la résurrection de Jésus pour la confession de foi et au risque d’interpréter les apparitions comme formes d’expression de la foi des disciples, il place au niveau de »traditions that belong to the oldest Christo-logy« des noeuds christologiques assez différents entre eux: résurrection, ascension, préexistence, médiation de la créa-tion (201). Certainement, le discours sur la christologie implicite (215) reste un défi exégétique sur lequel on doit encore beaucoup réfléchir.
Le livre finit avec le chapitre 14 (219–247), qui veut explorer quelques chemins ouverts par l’événement Jésus tout au long de l’his­toire humaine. S. aborde des sujets très différents comme le dogme christologique, les textes apocryphes, la liturgie, la musique et l’art religieux, l’éthique du Sermon sur la Montagne, le cinéma et le théâtre. Le beau livre de S. se termine sur une question: Qui est Jésus aujourd’hui? C’est seulement un regard à la fois critique et croyant sur Jésus, qui peut donner une réponse définitive juste à cette ques­tion fondamentale.