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Ausgabe:

Juli/August/1999

Spalte:

734–736

Kategorie:

Neues Testament

Autor/Hrsg.:

Gamba, Giuseppe Giovanni

Titel/Untertitel:

Vangelo di San Matteo. Una proposta di letture. 1: Mt 1,1-4,16: Chi è Gesù Cristo.

Verlag:

Roma: LAS 1998. 326 S. gr.8 = Biblioteca di Scienze Religiose, 137. ISBN 88-213-0376-4.

Rezensent:

Renzo Petraglio

L’auteur, professeur ordinaire émérite à l’Università Pontificia Salesiana de Rome, nous présente ici le fruit de ses recherches qui se sont poursuivies pendant plus de trois décennies, à partir d’un article intitulé "Considerazioni in margine alla poetica dei Vangeli" et paru en 1965. Le titre de cette première étude révélait déjà l’intérêt du chercheur pour les analyses littéraires et les lois de la composition développées dans la rhétorique grecque et romaine.

Maintenant, l’auteur nous invite à reconnaître, dans les premiers chapitres de Matthieu, l’intérêt et les soins constants de l’évangéliste pour une composition rhétorique efficace.

En nous livrant cette étude, G. est bien conscient d’avoir fait une tentative qui implique des incertitudes et des interrogations. Voilà pourquoi il nous signale, déjà dans le titre, qu’il s’agit d’une proposition de lecture.

Dans son analyse, l’auteur procède avec une grande minutie. D’abord, il isole la section qu’il étudie, en justifiant son découpage du texte biblique par rapport à ce qui précède et à ce qui suit. Ensuite, il aborde la structure de la section qu’il analyse; deux paragraphes mettent efficacement en évidence cette structure: le premier nous présente le texte grec disposé per cola et commata, le second, une traduction italienne du même texte, traduction qui est un calque du grec, fidèle jusque dans les moindres détails. En ayant sous les yeux l’un ou l’autre de ces paragraphes, le lecteur peut suivre G. dans ses considérations sur le style de Matthieu, sur la disposition du contenu, sur sa bipartition ou sa tripartition, sur la tension entre les différentes parties du texte, sur le goût de l’évangéliste pour la concision d’une tournure ou pour la variation par rapport à ce qui précède. Enfin, l’analyse de chaque section de Mt 1,1-4,16 présente des considérations sur la signification fonctionnelle et doctrinale du texte biblique.

Voilà la partie centrale et la plus vaste du livre de G. Elle est précédée (11-53) d’une introduction à l’évangile de Matthieu, et complétée (315-322) d’une bibliographie.

Pour rendre compte de ce livre plus en détail, je commence par l’introduction qui porte le titre "Matthieu: l’Evangile de l’Eglise-Mère" (les trois majuscules sont de l’auteur). Après avoir illustré le rôle primordial de cet évangile pendant les premiers siècles, G. explique ce fait par la convergence de trois causes de nature différente, c’est-à-dire la date de composition de cet évangile, l’autorité qu’il exerce, la forme systématique et complète qu’il présente. En partant de ces données, l’auteur de cette étude considère notre évangile comme "une initiative du sommet de la communauté chrétienne, donc des Douze Apôtres, au moment où ils étaient sur le point de quitter la Palestine et de se disperser dans les différentes régions du monde ambiant" (13).

Cette simple citation laisse entrevoir les réponses que G. donne aux questions classiques concernant l’auteur, la langue originale et la datation de cet évangile. D’après le professeur romain, l’auteur est Lévi, qui aurait probablement reçu de Jésus le nom de Matthieu (= don de Yahvé ou fidèle); la langue originale est l’araméen, le lieu de composition évidemment la Palestine; la date se situe entre 42 et 44. Enfin, pour ce qui est du texte grec, G. rappelle les écoles de grammaire et de rhétorique: dans ces écoles, la traduction était un des exercices fondamentaux; on insistait sur la nécessité de ne pas traduire mot à mot, mais de dépasser en netteté et concision le texte qu’on avait sous les yeux. Dans ce but, Flavius Josèphe avait recours à des collaborateurs très capables. "Or, rien n’empêche de penser que l’Apôtre Matthieu agissait de la même façon pour l’édition grecque de son écrit, édition qui, par conséquent, se révèle très soignée et correcte du point de vue de la grammaire et de la langue et surtout du point de vue rédactionnel-rhétorique ou formel" (29).

Après l’introduction, les pages 55-314 sont consacrées au commentaire de Mt 1,1-4,16. Pourquoi cette partie ? Ce choix résulte de la conception globale de l’évangile de Matthieu. D’après G., cette uvre littéraire est composée de deux parties elles-mêmes subdivisées; au milieu de ces grandes sections trouve 4,12-16. Voici le plan proposé (311):

a) 1,1-2,23: qui est Jésus: par rapport à l’économie de l’AT

a1) 3,1-4,11: qui est Jésus: par rapport à l’économie du NT

centre) 4,12-16: Jésus, la grande lumière

b) 4,17-25,46: ce que Jésus a fait: proclamation de la bonne

nouvelle

b1) 26,1-28, 20: ce que Jésus a fait: réalisation de la bonne

nouvelle.

Nous avons ici une structure en chiasme, qu’on doit probablement mettre en relation avec la lettre grecque X et qui suggère un renvoi au titre de XÚÈÛÙ (cfr. 310, note 75). C’est précisément aux premiers éléments de ce chiasme et à son centre que G. consacre son étude.

Pour montrer comment l’auteur commente le texte biblique, je prends pour exemple Mt 4,1-11, le récit des tentations de Jésus. Après avoir justifié le découpage du texte et l’avoir présenté (en grec et en italien) avec une disposition qui en marque la structure, G. montre avec acuité comment l’évangéliste a soigné le style de son texte. Ensuite, l’exégète se penche sur sa signification fonctionnelle et doctrinale. La première tentation de Jésus est présentée comme la tentation de la convoitise de la chair, la deuxième comme la tentation de l’orgueil de la vie, la troisième comme la tentation de la convoitise des yeux. Les trois tournures sont empruntées à 1 Jean 2,16, et G. explique la première comme "attachement au plaisir corporel déréglé. Ce concept, du point de vue biblique, comprend deux grands domaines: le plaisir déréglé de la gourmandise et le plaisir déréglé des sens (sexualité). Tout au long de son développement catéchétique, l’Evangéliste s’occupera plusieurs fois de ces deux domaines. Et le lecteur doit être attentif à leur complémentarité. Dans ce contexte, la pratique ascétique du jeûne, c’est-à-dire l’abstinence par rapport à la nourriture, trouve son complément naturel dans la pratique ascétique de l’eunuchie, c’est-à-dire dans le célibat, pour le Royaume des cieux " (282).

Après avoir relaté ces considérations sur la première tentation, il faut dire un mot sur la conception globale du récit des tentations. L’auteur prend la parole à la première personne et avoue: "Je suis porté à penser qu’il s’agit d’un événement externe et sensible parce qu’il a pour protagoniste Jésus en tant que ’fils de l’homme’, c’est-à-dire en tant que nouvel et vrai Adam. Par conséquent, le récit doit être compris au sens littéral. Le diable se serait approché de Jésus sous une forme corporelle humaine (comme il aborda Eve sous la forme d’un serpent) et il aurait parlé à Jésus d’une voix humaine; ensuite il l’aurait accompagné à Jérusalem, sur le faîte du temple, puis sur une montagne très élevée, etc." (279). L’auteur ajoute: "Evidemment, l’événement n’eut ni pouvait avoir aucun témoin oculaire ... Etant donné son caractère paradigmatique exemplaire, il fut raconté explicitement et abondamment par Jésus aux disciples: c’est une des nombreuses confidences faites par Jésus aux siens. Ces derniers, en raison de l’importance et de la signification doctrinale de l’événement, nous l’ont transmis en le fixant, entre autre, dans les Evangiles écrits" (280).

Ce n’est pas à moi d’exprimer un jugement. Les lecteurs vont certainement réagir, d’une façon ou d’une autre, devant cette proposition de lecture.