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Ausgabe:

Juni/2014

Spalte:

713–714

Kategorie:

Bibelwissenschaft

Autor/Hrsg.:

Schüssler, Karlheinz [Hrsg.]

Titel/Untertitel:

Das koptisch-sahidische Johannesevangelium sa 506 aus dem Jeremias-Kloster von Sakkara. Mit Textvarianten der Handschriften in Barcelona, Cairo, Dublin, Naqlun, New York.

Verlag:

Wiesbaden: Otto Harrassowitz 2013. XII, 277 S. m. 2 Abb. u. 1 Tab. = Arbeiten zur Biblia Coptica, 1. Kart. EUR 78,00. ISBN 978-3-447-06735-5.

Rezensent:

Philippe Luisier

C’est avec grand intérêt que nous attendions le premier volume d’»ABC«, une collection lancée par l’A., tragiquement disparu le 7 octobre 2013, dont les travaux sur les manuscrits saïdiques de l’Ancien et du Nouveau Testament nous ont occupé dans ces colonnes depuis plus d’une décennie, cf. ThLZ 125 (2000), 966 etc. Sous une belle couverture bleu sombre, le livre est élégant et sa facture très soignée. Toutefois, dès qu’on le feuillette, on se demande pourquoi le copte est publié sous une double forme, d’abord en continu, »Fliesstext« (79–135), puis en transcription de type diplomatique (137–269), sinon peut-être pour gonfler le volume? Ce qui frappe en revanche le spécialiste, c’est l’absence d’un apparat critique – réservé, nous dit-on dans l’Avant-propos (VIII) à un futur »Coptic John« –, ce qui prive cette édition d’une quelconque importance du point de vue de la critique textuelle du Nouveau Testament copte, puisque, comme l’A. le dit lui-même (VII), Hans Quecke avait collationné le manuscrit de Dublin et noté toutes les variantes quand il avait publié celui de Barcelone, cf. Das Johannesevangelium saidisch. Text der Handschrift PPalau Rib. Inv.-Nr. 183 mit den Varianten der Handschriften 813 und 814 der Chester Beatty Library und der Handschrift M 569 (PapyCast 11), Roma/Barcelona 1984. Dans le »Vorwort«, l’A. explique son choix en disant qu’il cède aux instances d’utilisateurs de son »Verzeichnis«: on l’a sollicité à publier les manuscrits dont il a donné la description dans sa liste. À notre avis, comme nous l’avons déjà écrit dans nos comptes rendus, au lieu d’encombrer nos bibliographies de titres oiseux, on peut très bien attendre la collation des témoins dans la future édition critique. D’autre part, comment justifier du point de vue économique des entreprises comme le »Verzeichnis« et ces nouveaux »Arbeiten«, quand on sait combien de beaux projets sombrent dans l’oubli, faute de financement adéquat?
La Bibliographie (première section, mais paginée encore: VIII–XII) mentionne enfin, contrairement au »Verzeichnis« qui l’avait soigneusement évité, le nom de G. Aranda Pérez, éditeur de Mt et Mc en copte saïdique sur la base de »sa 508«, un manuscrit de la Pierpont Morgan Library de New York. Malheureusement, l’A. semble tout ignorer de l’état civil du coptisant espagnol, pourtant correctement cité dans Biblia Coptica. Die koptischen Bibeltexte, 3.1, Wiesbaden 2001, 44, puisqu’il le met sous »Pérez, A.« (11), comme si le patronyme »Aranda« était le prénom qui est en fait »Gonzalo«. Après la brève Introduction (section 2, 1–3), nous trouvons une troisième section intitulée »Die Handschrift sa 506« (5–77) qui contient bien plus que ce que le titre laisse entendre. On trouve d’abord une description minutieuse du manuscrit dont on retiendra surtout les pages consacrées aux kephalaia, avec un utile tableau (18–25). Nous le disons non sans ironie, puisque le collaborateur nommé (VIII) et futur éditeur du »Coptic John« avait été incapable de reconnaître un kephalaion de Lc (»Der koptische Text ist rätselhaft«) sur un fragment viennois, cf. notre sévère admonition dans OCP 76 (2010), 209–211: gageons qu’il saura mieux faire!
Déjà quand il parle des kephalaia, sans trop avouer ce qu’il doit à ses devanciers – le copte de p. 21 a déjà été publié par H. Quecke en appendice, cf. Das Johannesevangelium saidisch, 223, et ne présente donc rien de nouveau –, l’A. ne se contente plus du témoin »sa 506«, mais se réfère à tous ceux qui ont conservé Jn en entier. Inutile de dire que là où il traite des citations de l’Ancien Testament dans le qua-trième Évangile (25–30), il n’y a aucun renvoi à notre ouvrage paru à Genève en 1998, qui pourrait offrir quelques compléments. Arrive ensuite un très long paragraphe (31–76) intitulé »Die Sprache des Johannestextes«, une espèce de fourre-tout où l’on trouve à côté de minuties sans intérêt, comme si »sa 506« méritait l’attention que l’on doit réserver à un manuscrit unique ou fort ancien, de nombreuses observations qui viennent s’ajouter à d’autres sur les mêmes sujets: problèmes d’orthographe copte et grecque, de grammaire etc.
Il est surprenant de voir que l’A. n’utilise même pas les instruments de travail qu’il a sous la main, comme l’édition de Horner publiée à Oxford en 1911 dont l’apparat critique est une mine de renseignements. Ainsi, au sujet de Jn 11,5 (60), on trouve neuf lignes pour nous expliquer que c’est la »Verehrung der Maria bei den koptischen Christen« (mais de quelle Marie s’agit-il?) qui les pousse à introduire le nom de la sœur de Lazare absent du texte grec dans la vingt-septième édition de Nestle-Aland et changer l’ordre des deux sœurs: »Jésus aimait Marie, Marthe sa sœur et Lazare«. Il suffisait de consulter l’apparat de Horner pour voir que le problème est plus complexe en grec déjà, puis en copte – la leçon »Marthe, Marie sa sœur et Lazare« du manuscrit de Barcelone se trouve également dans »sa 710« et peut-être »sa 510«, ainsi que dans la majorité des manuscrits bohairiques –, mais le syriaque aussi doit être pris en compte, cf. G. A. Kiraz, Comparative Edition of the Syriac Gospels. Aligning the Sinaiticus, Curetonianus, Peshîṭtâ and H. arklean Ver-sions, IV, John, NTTS 21,4, Leiden/New York/Köln 1996, 207 (relevons en passant que l’apparat de Merck notait les variantes de quelques manuscrits grecs et du Sinaiticus syriaque). En matière de critique textuelle, il est désinvolte d’arguer de la seule dévotion copte pour liquider la question.
Il se trouvera sans doute des lecteurs plus indulgents que nous pour louer ce volume et les efforts remarquables, que nous ne saurions nier, déployés par l’A. dans son édition de »sa 506«: il n’y a, par exemple, presque pas de coquilles, comme le mot »polis« qui est resté écrit en lettres latines dans le »Vokabularium« (275). Quant à nous, il nous est difficile de cacher notre déception.