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Ausgabe:

April/2011

Spalte:

405-407

Kategorie:

Neues Testament

Autor/Hrsg.:

Niebuhr, Karl-Wilhelm, and Robert W. Wall [Eds.]

Titel/Untertitel:

The Catholic Epistles and Apostolic Tradition.

Verlag:

Waco: Baylor University Press 2009. X, 536 S. gr.8°. Lw. US$ 69,95. ISBN 978-1-60258-215-6.

Rezensent:

Jacques Schlosser

Une brève introduction des deux éditeurs attire l’attention sur le peu d’intérêt que l’exégèse biblique a accordé pendant longtemps aux épîtres catholiques (EC) et sur le renouveau qui s’est produit depuis une dizaine d’années. Un des lieux marquants de ce renouveau fut le séminaire pluriannuel tenu dans le cadre de la SNTS. Les études rassemblées dans ce volume en proviennent (voir 367–368).
La nouvelle perspective qui se fait jour dans ces travaux, sans toutefois les marquer tous au même degré, valorise l’appartenance des sept lettres au même corpus canonique. On avait bien remarqué les liens tissés entre les lettres par quelques expressions ou idées. Il fallait aller plus loin en montrant comment l’ensemble canonique Jc – Jude éclairait plus ou moins la lecture de chaque lettre et entrait en résonance avec le corpus paulinien. Seule la prise en compte des Actes a permis de progresser vraiment.
La démonstration est proposée avec enthousiasme par R. Wall qui reprend pour l’essentiel sa contribution aux actes des Journées Bibliques de Leuven (voir BEThL 176, 2004, 43–71). Parce que cet essai illustre la nouvelle perspective, il importe de présenter ses aspects majeurs. On sait que pour Jc la reconnaissance canonique ne fut pas facile, sans doute en raison de sa pointe apparemment antipaulinienne. En plaçant Jc en tête d’un corpus comportant des lettres de Pierre et de Jean on mobilisait des personnages de premier plan que les Actes présentaient comme des soutiens de Paul: Pierre d’abord (Ac 15,7–12) et Jacques ensuite (15,13–21). Pour éviter les pièges de la fantaisie, l’exégète gagne à recourir à ce que Wall appelle une »grammaire théologique«. L’examen attentif du corpus montre que des thèmes théologiques développés dans Jc ont leurs correspondants dans le reste du corpus catholique, par exemple les souffrances comme test et purification de la foi. Le lecteur du présent ouvrage gagnera à lire dans la foulée les deux autres contributions de Wall: Acts and James (127–142) avec l’appendice sur la théologie commune aux EC (142–152) et The priority of James (153–160).
La partie III (41–200) rassemble, en plus de celles de Wall juste mentionnées, six études consacrées à Jc. Niebuhr lit Jc selon une méthode commandée à la fois par la critique de la réception et par le principe canonique. Les destinataires impliqués en 1,1 ne peuvent être que des judéo-chrétiens pour qui Jacques est certainement le frère du seigneur écrivant de Jérusalem où il dirige la première communauté chrétienne. Vu le portrait canonique de Jacques (Ac 15 et Ga 1,18–19; 2,6–10), les destinataires n’étaient pas portés à accorder une place centrale à l’apparent conflit avec Paul (Jc 2,14–26). Ils ont sans doute bien compris que le discours insiste sur la nécessité de mettre la loi en pratique (Jc 1,22–2,13).
P. J. Hartin (55–70) et J. Kloppenborg (71–100, voir BEThL 176) étudient tous deux l’enracinement de Jc dans la tradition de Jésus. L’exégèse scientifique du Nouveau Testament perdrait beaucoup si elle négligeait des études fondamentales de ce genre.
Pour tenter de déterminer le milieu auquel appartient l’auteur réel de la lettre, M. Konradt (101–125) revient sur les liens entre 1P et Jc. La reprise directe d’un auteur par l’autre n’est pas vraisemblable, il s’agit plutôt de l’exploitation d’une même tradition selon la ligne de chacun. La parenté commune de 1P et de Jc avec Mt est à relever. Ces observations plaident pour l’insertion syrienne de Jc. Un compromis y était possible. Selon Ac, le frère du Seigneur n’était pas frontalement hostile à l’admission des païens pratiquée par Paul. De leur côté les chrétiens d’Antioche, en lien avec Pierre et Barnabé, ne semblent pas avoir partagé la position radicale de Paul sur la commensalité, ils reconnaissent une certaine légitimité aux demandes de Jacques, garant de la place de la Tora dans l’Église.
À la première version de son article (Interpretation 60, 2006, 245–259), J. Painter a ajouté un appendice sur le vocabulaire particulier de Jc (161–181). Sa contribution relève largement d’une »introduction« classique, mais l’insistance récente sur le corpus des EC est prise en considération. Si l’on admet que Jc est placé par son auteur en tête des EC en raison de l’autorité revenant au frère du Seigneur dans la communauté de Jérusalem et que Jude occupe la place finale du corpus parce qu’il est lui aussi frère du Seigneur, l’agencement des EC se comprend bien. Les destinataires historiques de Jc sont probablement des juifs en situation de diaspora, mais la lecture canonique les transforme en chrétiens universels. Leur précarité dans le milieu ambiant se traduit par des tribulations et des persécutions, de sorte que leur situation ne se distingue guère de celle des destinataires historiques.
Parmi les auteurs rendant compte de Jc à partir du fait canonique, D. R. Nienhuis, qui résume ici (183–200) sa monographie de 2007, est sans doute le plus radical. Alors que le »frère du Seigneur« tient une grande place dans l’ancienne littérature chrétienne, sa lettre est très peu attestée avant Eusèbe. Ce constat exclut pratiquement l’authenticité de Jc. La lettre est un produit tardif élaboré pour conforter le canon des EC. La »new perspective« plaide pour qu’on ne lise pas Jc en fonction de Paul: selon Nienhuis Jc doit son existence à la réaction contre Paul. L’auteur insiste sur les nombreux contacts qui, en plus de Jc 2,14–26, existent entre Jc et les lettres de Paul. Parfois précis au point de suggérer la dépendance littéraire, ces contacts laissent à penser que l’auteur réel connaît les textes de Paul, surtout Rm, et considère qu’ils sont familiers à ses destinataires. Au 2 e siècle Paul est revendiqué par des chrétiens qui prennent leurs distances par rapport à l’héritage juif. Pour contrer cette dérive un auteur anonyme a rédigé Jc, dans une perspective délibérément canonique, afin de valoriser l’enracinement juif du fait chrétien par le recours aux grandes figures aposto­liques (Pierre et Jean) et familiales (Jacques, Jude). La thèse est audacieuse. Les nombreuses spéculations et suppositions sur lesquelles elle se fonde invitent au moins à la réserve (voir la réaction négative de P. J. Hartin, webside de la SBL RBL 11, 2008).
Deux très bonnes études sont proposées sur 1P par R. Feldmeier (203–213: anthropologie et salut; voir BEThL 176, 291–306) et L. Doering (215–236: 1P comme diaspora letter). Pour l’exégèse de Jude on ne pourra pas se passer de l’étude globale de J. Frey (309–329) ni de l’analyse précise de Jude 5 par S. J. Hafemann (331–342).
Les épîtres johanniques n’ont droit qu’à une seule étude (239–305). Auteur d’un important commentaire de ces lettres, J. Painter était tout indiqué pour s’en charger. Le titre The johannine epistles as catholic epistles suscite chez le lecteur une attente qui ne sera pas vraiment satisfaite. Toutefois, Painter reconnaît la valeur des indices de canonisation relevés par d’autres auteurs en renvoyant lui aussi au rôle des colonnes et de l’assemblée apostolique (244–248.295). Mais il se concentre surtout sur les lettres comme produits johanniques, et le lecteur ne s’en plaindra pas. En effet, en scrutant avec minutie les liens entre Jn et 1Jn ainsi que les contacts entre 1Jn et les deux lettres de l’Ancien, Painter réalise un condensé tout à fait remarquable sur le style, la langue, les opposants et surtout la pensée théologique des lettres johanniques.
E. Baasland (345–368) conclut ce beau et riche volume en prenant de la hauteur et en ouvrant un nouveau chantier: les EC comme sources utiles dans la recherche historique sur la période post-apostolique (70–150).